Enquête: La conciliation travail-étude
Les conséquences négatives sur les études d’un trop grand nombre d’heures de travail chez les étudiants du secondaire
Le programme 6-9-15 Je m’engage à la réussite!, appliqué aux employés de la Ville de Gatineau
Lors du conseil municipal de Gatineau le 19 février dernier, la coprésidente de la Commission Jeunesse de Gatineau, LibanaKassab, a remis un certificat au maire Marc Bureau pour souligner l’adhésion de la ville de Gatineau au programme de Conciliation travail-études 6-9-15 Je m’engage à la réussite!
Depuis quelques années, la Commission Jeunesse de Gatineau travaille avec divers partenaires à la persévérance scolaire, dont le Comité d'amélioration de la persévérance scolaire (CAPS), la Table Éducation Outaouais (TÉO) et Carrefour jeunesse emploi de l'Outaouais, au programme de Conciliation travail-études 6-9-15, je m’engage à la réussite! Ce programme consiste à certifier les employeurs qui s’engagent à porter une attention particulière à la réussite scolaire de leurs employés-étudiants en respectant le règlement qui suit :
« ’ L’étudiant, durant la période scolaire, ne doit pas travailler plus de 6heures entre le lundi et le jeudi.
L’étudiant, durant la période scolaire, ne doit pas travailler plus tard que 21heure.
L’étudiant, durant la période scolaire, ne doit pas travailler plus de 15heures par semaine.’’
Puis, durant les semaines d’examens, les employeurs doivent être indulgents envers leurs employés-étudiants et ne pas nuire à leurs études en vue de leurs examens. Évidemment, ces règlements ne s’appliquent pas durant les périodes de vacances scolaires.
Ce programme vise avant tout à prévenir le décrochage scolaire dû par exemple, au besoin pressant des jeunes d’être sur le marché du travail ou encore pour prévenir des situations dans lesquelles le travail nuit aux études du jeune.
Bref, c’est avec joie que la Ville de Gatineau décide d’accepter le programme études 6-9-15, je m’engage à la réussite! Notons que la Ville est l’un des premiers employeurs parmi les 43 entreprises à y avoir adhéré.
« La persévérance scolaire est un enjeu important et c’est sans contredit ensemble que nous en assurerons la réussite. »Conclut la coprésidente de la Commission Jeunesse de Gatineau.
Les conséquences négatives sur les études d’un trop grand nombre d’heures de travail chez les étudiants du secondaire
Les jeunes travaillent trop
Le portrait est toujours le même : le jeune travail à temps partiel pour gagner de l’argent, il veut s’acheter une nouvelle paire de jeans qui coûte 200$, il demande plus d’heures, il a du mal à gérer son temps entre les études et le travail, il a de mauvaises notes à l’école, il n’est plus concentré à l’école, il quitte ses études et commence à travailler à temps plein.
La société de consommation dans laquelle nous vivons encourage la consommation massive de produits à prix plus abordables. Plus les prix sont abordables, plus on les veut même si ce sont des produits farfelus et complètement inutiles. Un iPod nano 3Gcoûtent 160$ ce qui consiste à environ 16h de travail au salaire minimum. Ce n’est pas beaucoup, une semaine de travail suffit. Les jeunes travaillent plus pour des babioles qui ne leur servent pas.
Ce phénomène se propage de plus en plus. En 1994, moins de 60% des jeunes du secondaire occupaient un emploi à temps partiel pendant leurs études. En 2001, on en compte plus de 66% puis en 2002, on calcul plus de la moitié des jeunes du secondaire 4 et 5 qui travaillent durant leurs études.
Les conséquences d’un trop grand nombre d’heures de travail : L’argent aux dépens du diplôme
Un étudiant qui travaille trop risque de nuire à ces études. Celui-ci doit redoubler d’effort pour ses études ce qui peut provoquer des heures de sommeil moindre et beaucoup de stress. Dans le cas extrême, l’étudiant peut aller jusqu’à décrocher pour se consacrer à son emploi.
Les études démontrent que les décrocheurs perdent un haut revenu par année en décrochant. Un jeune qui décroche en secondaire 2 perd en moyenne près de 175 000$ de revenus et celui qui décroche en secondaire 5 perd 85 000$. Pour appuyer cette recherche, les statistiques démontrent que les étudiants qui ne possèdent pas un diplôme d’études secondaires sont actifs à 22,9% alors que ceux qui possèdent un diplôme d’études secondaires sont actifs à 64,5. Ce pourcentage est tout de même loin de ceux qui possèdent un diplôme ou un certificat non universitaire comme un DEC ou un DEP, ceux-ci sont actifs à 80,3% et ceux qui possèdent un baccalauréat le sont jusqu’à 79,3%.
Également, on entend parler en ce moment de la nouvelle réforme sur l’assurance-chômage qui prévoit de trouver un emploi aux travailleurs saisonniers, et bien 60% des personnes qui sont présentement sur l’assurance-chômage et qui sont aptes à travailler n’ont pas leur diplôme d’études secondaires. La preuve est irréfutable : il est difficile de trouver un emploi convenable sans au moins un diplôme.
On parle beaucoup de ceux qui travaillent trop, mais qu’en est-il de ceux qui ne travaillent pas du tout? Selon Statistiques Canada, un étudiant qui ne travaille pas du tout a 1,5 fois plus de chances de décrocher que ceux qui travaillent de façon modérée soient de 15h par semaine.
Pourquoi les jeunes décrochent-ils?
En Outaouais, le taux de décrochage scolaire bat des records avec un taux de vingt-neuf pour cent. Il a augmenté de trois pour cent en 2011 : il est passé de 26% à 29%.
La question à se poser est : pourquoi les jeunes décrochent-ils? Les raisons les plus communes sont :
- Les jeunes ne sont pas motivés face à leur avenir.
- Les jeunes ont vécudifférents problèmes à l’école (intimidation par exemple)
- Les jeunes ont une instabilité familiale (plus présente chez les filles, car elles sont plus touchées) par exemple : dépression d’un des parents, négligence, violence conjugale ou physique, présents peu parents à cause d’un divorce qui force le parent à travailler plus, etc.
- Le jeune ou sa famille a des difficultés économiques.
Pour toutes ces raisons, le jeune va décrocher et se consacrer au travail pour commencer sa vie d’adulte précoce.
Le blâme est porté sur les parents indifférents, les employeurs qui abusent en donnant trop d’heures de travail et aux étudiants qui accepte sans broncher leurs conditions de travail qui les nuisent. Mais tous ces blâmes restent des hypothèses qui diffèrent d’une situation à l’autre.
Une solution pour contrer le décrochage scolaire
Le programme de Conciliation travail-études 6-9-15, je m’engage à la réussite!consiste à certifier les employeurs qui porte une attention aux études de leurs employés-étudiants. Ces employeurs s’engagent à respecter la règle de 6 – 9 – 15 : ne pas travailler plus de 6h entre le lundi et le jeudi, pas plus tard que 21h et pas plus de 15 heures par semaine durant l’année scolaire afin de prévenir le décrochage.
Sophie est une étudiante de dix-huit ans qui étudie au cégep de l’Outaouais. Elle travaille à temps partiel au IGA extra de Gatineau, rappelons que cet employeur est certifié au programme de conciliation travail-étude 6 – 9 -15, je m’engage à la réussite! Sophie a accepté de répondre à quelques questions concernant son emploi.
Question : Ressentez-vous de la difficulté à gérer votre vie entre le travail et les études?
Réponse : Non, non pas du tout. J’arrive à gérer mon temps, il suffit d’être bien organisé!
Q : Croyez-vous que votre employeur respecte votre statut d’étudiant?
R : Oui j'ai l'impression qu'il respecte le fait que je suis étudiante, même des fois quand j'ai des examens et que j'ai un quart de travail de prévu, si je ne peux pas rentrer il me l'enlève sans broncher. Je n’ai aucun problème à étudier et à travailler en même temps.
Q : Croyez-vous que le programme est utile et aide les jeunes dans la réussite de leurs études?
R : Oui le programme est utile, mon boss respecte le fais que j'ai de l'école, je fini jamais plus tard que 9h la semaine, et je n’ai pas plus que 15h semaine.
Q : Encourageriez-vous les jeunes étudiants à travailler pour des employeurs qui adhère au programme 6 – 9 -15, je m’engage à la réussite!
R : Oui j'encouragerais les gens à travailler à ces places-là, il respecte vraiment le fait que tu sois aux études.
Q : Quel est votre horaire de travail?
R : Habituellement J'ai 2 ou 3 quarts de travail par semaine, j'ai une journée dans la fin de semaine et 2 soirs pendant la semaine. Habituellement le mardi et vendredi soir, et soit le samedi et dimanche toute la journée.
Q : Est-vous satisfaite de votre emploi?
R : Oui! J’aime beaucoup travail au IGA, ça va faire bientôt six mois que je travail là et je ne suis pas tanné encore! (rires)
Q : Merci beaucoup Sophie.
R : Ça fait plaisir.
Samuel (nom fictif pour garder la confidentialité du jeune) est un jeune décrocheur de dix-huit ans qui travail à temps plein au Mc Donald, rappelons que cet employeur n’est pas certifié au programme de conciliation travail-étude 6 – 9 -15, je m’engage à la réussite! Samuel a accepté de répondre à quelques questions concernant son emploi.
Question : Pourquoi avoir quitté l’école?
Réponse : Je me faisais intimider à cause de mon orientation sexuelle.
Q : Combien de temps cela a-t-il duré?
R : Je me suis affirmée bisexuelle durant mon secondaire trois et j’ai quitté à la fin de mon secondaire 4.
Q : Vous avez donc préféré quitter l’école et travailler.
R : Oui. Je n’étais plus capable de me rendre à l’école. Je me suis donc dit que tant qu’à ne pas être en cours, je devrais travailler et commencer à faire ma vie.
Q : Que prévoyez-vous faire à l’avenir?
R: Je prévois finir mes maths de secondaire quatre et mon français aux adultes. Ensuite, je vais suivre des cours de moto. J’aime beaucoup les chars, mon oncle à un garage et je prévois travailler avec lui dès que je fini les études nécessaires. Je vais surement faire une technique dans ce domaine. Après tout, j’ai assez d’argent pour me payer ces études et mes parents m’aident beaucoup aussi.
Q : Regrettez-vous d’avoir quitté l’école?
R : Évidemment, j’ai beaucoup de retard dans mon cheminement. Il va falloir que je refasse mes maths puis tout mon secondaire cinq, physique, chimie, etc. Mais c’est des matières que je connais bien et j’ai beaucoup de facilité. J’ai quand même appris de moi-même quand j’ai quitté l’école.Je ne suis pas restéinactif. Cela m’avantage beaucoup. Je serais censée avoir fini ma première année de cégep.
Q : Est-vous satisfait de votre emploi?
R : Non! (rires) les gens sont gentils, mais ce n’est pas un emploi que je veux garder longtemps. Ma gérante a passé sa vie au McDo, elle est gérante et elle a quand même de la difficulté à faire vivre sa fille. Imagine si elle était encore qu’une employée à cetâge-là! Je ne veux vraiment pas d’une vie comme ça plus tard.
Q : Merci beaucoup Samuel.
R : Ça me fait plaisir.
Une société qui favorise la richesse matérielle au profit de la richesse intellectuelle
29% à un examen de français, c’est peu. Mais quand il est question de décrochage scolaire, c’est un pourcentage phénoménal! Les partenaires de la persévérance scolaire dont la TJO et la Commission Jeunesse de Gatineau ont implanté le programme 6 – 9 – 15, je m’engage à la réussite!pour prévenir les employeurs de faire attention à leurs employés-étudiants et les encourager à rester sur les bancs de l’école.
Les habitants de Gatineau pourront dire ce qu’ils veulent, il faut avouer que le programme est très efficace. À ce jour, il y a plus de quarante entreprises certifiées au programme de conciliation travail-étude. Toutes ces entreprises respectent la règle du 6 – 9 – 15 soit de ne pas faire travailler les jeunes plus de six heures entre le lundi et le jeudi, ne pas les faire travailler plus tard que vingt-et-une heures et pas plus de quinze heures par semaine durant la période scolaire.
Pourquoi créer un programme pour la conciliation travail-étude? C’est simple. La majorité des décrocheurs quittent l’école au profit d’un emploi. La société de consommation dans laquelle nous sommes privilégie, et de loin, les biens matériels et le bling-bling, au profit d’un diplôme. À quoi sert le diplôme quand on peut commencer à travailler plus tôt et avoir beaucoup d’argent tout de suite? Le problème avec cette vision-là, c’est qu’on ne peut pas vivre toute une vie en travaillant au McDonald à 9,90$ de l’heure.
Le décrochage coûte cher à la société. Les décrocheurs n’ont pas un emploi très convenable et bien payé généralement. Ceux-ci utilisent donc l’assurance-chômage quand ils perdent leur emploi. 60% des individus qui profitent l’assurance-chômage et qui sont apte à travailler (précisons-le) sont de jeunes décrocheurs qui n’ont même pas leurs diplômes d’études secondaires. Coïncidence? J’en doute fortement. On dirait que McDonald les a remplacés pour de flambants neufs jeunes étudiants qui malheureusement, risquent de finir comme eux dans une vingtaine d’années. Et ce n’est pas tout, un salaire moindre enlève beaucoup d’argent à l’État en taxes. Si tous les anciens décrocheurs avaient un diplôme, ils travailleraient mieux et l’État recevrait plus pour redonner à la société. Bref, les décrocheurs paient peu de taxes, car il travaille pour un salaire ridicule et en plus ils utilisent l’assurance-chômage quand on les remplace par des diplômés qui, rappelons-le, ne donnent que 70% du salaire habituel; quelle belle vie n’est-ce pas?
Sur qui mettre le blâme? Dépendamment des cas, le blâme est soit sur les parents qui sont indifférents face à l’avenir de leurs enfants, soit sur les employeurs qui donnent plus d’heures et obligent les jeunes à les accepter sous peine de renvoi, soit sur l’étudiant qui accepte ses mauvaises conditions de travail, ou encore on peut blâmer la société qui encourage la consommation massive de produit stupide et inutile. Dans ce dernier cas on pourrait pointer du doigt les scientifiques ou les ingénieurs qui inventent les produits complètement inutiles, les entreprises qui vendent ces produits et qui cherche à faire des millions de plus que les autres multinationales (Coca-Cola qui veut plus d’argent que Pepsi, mais qui au final vendent le même produit aussi mauvais soit-il), les créateurs publicitaires qui fait que nous voulons ce produit même si l’on n’en a pas du tout besoin et j’en passe. Bref, lesvrais coupables sont cachés loin derrière la mascotte de Burger King et celle du Harvey.
La société encourage les jeunes à consommer plus, mais on leur dit qu'il faut rester aux études. Quelle belle contradiction. Les plus vieux voudraient que les étudiants travaillent beaucoup et étudient en même temps. On va se le dire, il y a vingt ans, les frais de scolarité étaient beaucoup moins élevés et le coût de la vie également. Ceux qui chialent c'est ceux qui ont eu la vie facile.Mets mes souliers, marche quelques kilomètres, vis mes peines, mes angoisses, mes réussites et mes défaites, puisà ce moment-là tu pourras me critiquer. C’est exactement ça que je dis à ceux qui traitent les étudiants de fainéants. La société a beaucoup donné aux générations précédentes, tellement données qu’il ne reste plus rien pour les jeunes d’aujourd’hui. À qui la faute? Peu importe, car de toute façon les vrais coupables en rient sous leur tombe. Ce qu’il faut faire c’est de se reprendre en main et créer des programmes qui vont encourager nos jeunes à s’éduquer et à créer leur futur.
Étudier et travailler ce n’est pas chose facile et on ne devrait pas forcer la relève de demain à se fatiguer dès le secondaire. Ils ont encore toute leur vie pour le faire.